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07/05/2020

BÄRLIN - Interview 2020 (Low rock, jazz, post punk)

BÄRLIN - Interview 2020 (Low rock, jazz, post punk)

C’est un groupe à la musique sombre, nocturne, et expérimentale, quelque part entre post punk années 80 et jazz, avec presque des penchants vers la musique classique. J’ai pu croiser leurs mélodies sombres fin 2017 au Red studio, et leur style m’avait interpellé et assez envouté. Ils viennent de sortir un nouvel album, c’est l’occasion d’en apprendre plus sur leur univers. (Interview mai 2020)
 BÄRLIN - Interview 2020 (Low rock, jazz, post punk)



1. Salut, quoi de neuf chez BÄRLIN dernièrement?

Clément : Après bientôt trois ans de couveuse, notre prochain album est enfin disponible. Une sortie pas mal entravée par la crise actuelle mais la sortie numérique a bien eu lieu :)
C’est une belle occasion d’être découverts en plus largement et si tout va bien de tourner pas mal une fois le confinement levé. On était attendus à Lille, Paris et même Varsovie pour cette sortie. On croise les doigts pour le report prochain de ces belles dates qui étaient prévues au printemps…!!


2. Le terme "Low rock" parfois utilisé pour décrire votre musique me fait penser à quelque chose de déprimé, ou le moral est très bas...  A quoi fait-il référence pour vous? Tu dirais que votre style est plutôt sombre, déprimé, nocturne, torturé?


Clément : C’est un vieux débat que tu relances là ! Pas forcément friands d’étiquette, on s’est résolu à parfois accepter celle-là le jour où l’on a entendu Mark Sandman, frontman du trio de Boston Morphine décrire sa musique ainsi. Même si on en est plus loin aujourd’hui Morphine fait partie des groupes autour duquel Laurent et Simon se sont rencontrés et à partir duquel ils m’ont ensuite adopté 😊
On est ni dans l’excitation, ni dans la précipitation d’un rock énervé, strident ou clinquant. Alors même si le rock « bas » que l’on joue peut avoir l’air sombre, capitonné, c’est en fait surtout une musique profonde, habitée qui nécessite d’être apprivoisée. Le genre d’ondes qui touchent au cœur et résonne le long de la colonne. Je m’emballe, mais bon, tu vois où je veux en venir, non…? :)


3. Mais où sont passées les guitares? Avez-vous utilisé cet instrument dans certains de vos groupes précédents, ou il ne fait pas partie de votre univers?

Laurent : Effectivement, il n’y a pas de guitare électrique, seulement de la guitare basse ! Je suis guitariste et cela se ressent dans mon jeu, j’utilise beaucoup le médiator ;-) Finalement, c’est un choix purement artistique. Le besoin d’explorer, de créer à partir d’une basse en utilisant une multitude d’effets. Et je trouve que la clarinette se marie très bien avec la basse...ça sonne,  point barre !

BÄRLIN - Interview 2020 (Low rock, jazz, post punk)

4. Et d'où vient l'idée d'utiliser une clarinette?

Clément : Il a fallu que j’ose croire que la clarinette pouvait trouver sa place dans un groupe de rock. A mon arrivée à Lille, je jouais de la clarinette dans des formations de jazz swing et même dans un groupe de ska-jazz. On a cherché plus d’un an, à tâtons, à jouer avec Lo à la guitare et moi seulement au chant, c’est le jour où il a troqué sa guitare contre une basse et où j’ai tenté d’intégrer la clarinette que BÄRLIN est né!

Simon : une de nos références commune n’y est sûrement pas étrangère. Morphine : trio composé d’un bassiste/chanteur, sax et batterie. Ils avaient un son inimitable! Sans vouloir les copier, ils nous ont sûrement donné l’audace de faire “autrement”.


5. Quels pays sont les plus réceptifs à votre musique? J'ai entendu dire que vous avez été surpris par les réactions du public dans un festival à l'étranger…

Simon : Oui ! On a été démarché par un festival “Gothique” au Portugal il y a trois ans. Notre nom était inscrit tout en bas de l’affiche, en petit. Une grande majorité du public ne nous connaissait pas. Ils sont pourtant venus à 700 nous voir jouer dans un délire incroyable! Du coup on a pas mal de portugais qui nous suivent à distance et qui ont hâte qu’on revienne chez eux. Ça sera (normalement) le cas en septembre, à Porto !

Clément : in-ou-bliable, j’en ai encore des frissons. On était invités à jouer à Varsovie en mars aussi, on espère s’y rendre bientôt dès qu’on sera de nouveau libres de nos mouvements!


6. Vu votre style, vos influences musicales et extra musicales, vous êtes faits pour être diffusés sur Arte (En deuxième ou troisième partie de soirée). Pourquoi ne vous ont-ils pas encore contactés? AhAh

Laurent : BÄRLIN est probablement trop barré pour être diffusé sur Arte…trop de risques pour la prog!

Clément : mais non lol T’es le premier à avoir écrit à Trax qui accueille des gens plus barrés que nous :p entre Les Ailes du Désir, nos morceaux en allemand et notre côté inclassable je pense qu’ils pourraient kiffer :) D’ailleurs, si tu as des contacts, on est preneurs! ;)



7. Killing joke, Godflesh, Head of david, John Zorn, Naked City, Miles Davis... Certains de ces groupes ou musiciens font ils partie de vos influences?

Laurent : Perso, j’écoute beaucoup de musique (un peu trop d’ailleurs) ! Je fonctionne par période, une semaine rock, une semaine jazz, une semaine trip hop… avec un petit faible pour les musiques entre 70 et 90 ‘s. J’avoue aussi être un gros fan de Led zeppelin…  J’écoute de tout, alors oui Killing joke, John Zorn, Miles D. ça me parle mais il n’y a pas d’influence directe 

Clément : On n’est pas vraiment des encyclopédies musicales. A notre rencontre, Laurent et Simon m’ont fait découvrir tous les groupes devenus depuis nos principales influences : Nick Cave, Joy Division, 16 Horsepower, the Black Heart Procession… Je partais de rien, les deux gaillards m’ont vraiment fait mon éducation musicale… enfin surtout Laurent parce que Simon… ;)

Simon : Je ne vais sûrement pas me fâcher ! Disons que je suis sensible à à peu près tout. De la musique “de masse” qui sort à la radio aux groupes un peu plus confidentiels qu’on me fait découvrir. Je suis très bon public, je crois bien qu’on me le reproche mais je commence à assumer :)

Clément : Je me suis un peu rattrapé depuis et je pourrais bien dire que John Zorn/Naked City et Miles Davis sont des influences lointaines. Parmi nos influences, mes préférées sont celles que nous font découvrir les gens qu’on croise en concert. Tuxedomoon, Minimal Compact, And Also the Trees, Van der Graaf Generator que des groupes avec qui on s’est découvert une étonnante proximité après coup!


8. Je connais mieux les ambiances noires développées par le metal (Doom, black metal), ou l'industriel (Electro, ambiant). Je trouve que votre style s'en rapproche pour la noirceur assez forte de vos atmosphères, même si votre musique reste très différente... Que pourrais-tu expliquer à un amateur de métal pour lui ouvrir les portes de vos compositions, quelles clés pourrais-tu lui donner afin de mieux approcher votre style?

Clément : Among the Living a écrit un très bel article sur notre dernier album en racontant comment tout en étant déroutant The Dust of Our Dreams créait des atmosphères à la fois tendues et enveloppantes qui peuvent séduire l’oreille de bien des fans de metal. Reste à se laisser porter par le son et à laisser une brèche ouverte pour l’inconnu.


BÄRLIN - Interview 2020 (Low rock, jazz, post punk)


9. Quels sont vos meilleurs souvenirs de concerts? Vous préférez vous produire dans des salles assez grandes, ou les conditions plus intimistes de petits cafés vous conviennent aussi?

Laurent : Clairement le festival Entremuralhas édition 2017 ! Petite ou grande salle, c’est toujours un bon trip… L’ambiance bar est aussi très sympa, il y a toujours de la bonne bière !

Simon : On a eu la chance de vivre de très bons moments dans les deux cas, de manières très différentes. Je garde de très bons souvenirs dans des petits bars où la proximité des gens et l’émotion qu’on pouvait leur procurer était très palpable. Toujours aussi préféré le rapport au son de mon instrument dans cette configuration. Plus vivant je trouve.
Beaucoup de nos compositions actuelles demandent une certaine puissance sonore et elles vivent très bien les scènes avec un gros système son. Jouer devant des centaines de personnes dans ces conditions donne quand même un sentiment de puissance extraordinaire !

Clément : L’important c’est de sentir la connexion aux gens. Mais même si les concerts en salon peuvent être super pour ça, goûter aux concerts grand public rend vite addict!


10. Vous essayez de jouer en live avec des groupes de certains styles assez précis, comme du jazz, du post rock tordu, ou vous restez assez ouverts?

Laurent : Ouvert à toutes propositions …L’essentiel c’est de jouer !
Clément : Les premières parties qu’on a pu faire sont bien révélatrices de la palette de couleurs musicales qui est celle de BÄRLIN. And Also The Trees pour le côté cold wave romantique, Lydia Lunch et June of 44 pour les différentes nuances de punk, Esmerine pour le côté orchestral et mélancolique, Buriers pour le côté folk possédé...


BÄRLIN - Interview 2020 (Low rock, jazz, post punk)


11. Votre deuxième et dernier album date de 2015. Vous avez pu avancer sur la suite? A quoi cela ressemblera-t-il?


Laurent : Evidemment, l’Album “The Dust Of Our Dreams” en 2020, et une autre surprise pour 2021 ! Presque une vingtaine de titres …

Simon : On avance sur la suite en permanence… Nos morceaux sont composés au fil de l’eau. Il n’y a pas vraiment de concordance entre leurs sorties sur disque et le moment où ils sont joués sur scène. Lors de la dernière session d’enregistrement on a pu enregistrer une bonne quinzaine de titres. Après pas mal d’hésitations, la solution est apparue évidente : il fallait sortir deux albums différents. Ils sont pourtant inséparables l’un de l’autre, puisque qu’enregistrés, mixés et masterisés en même temps et par les mêmes personnes. Deux ambiances se sont détachées naturellement. “The Dust Of Our Dreams” le premier album de ce diptyque est plus romantique. Le second (qui sortira peu après) sera plus énergique et sombre. Et puis les pochettes feront le reste : elles sont littéralement indissociables. L’une découlant de l’autre. Surprise ! Pour le reste, on a déjà la matière pour un 5ème album. Certaines tournent déjà en concert ...


12. Qu'est-ce qui vous branche dernièrement musicalement? Et non musicalement? (Donc tout le reste: Livres, films, chaînes youtube, spectacles... Tout ce qui peut mettre en vie un être humain)

Clément : Je suis dans une longue vague de Einstürzende Neubauten, je dois écouter leur live de 2000 à Bruxelles toutes les deux semaines. Et sinon Swans, Colin Stetson : la musique qui met en transe. Gros coup de cœur vocal autour de Jungstötter aussi… Non musicalement, je ne me suis toujours pas remis de la série Il Miracolo, très belle ambiance sombre, dans un récit hyper-touchant sur le surnaturel, le mystique autour de l’histoire d’une statue de vierge qui pleure du sang :)

Simon : j’ai aussi été très marqué par cette série. Dans le style ésotérique il y aussi “Messhia”, qui met l’humanité et  les différentes religions à se poser la question du retour du Messie : vrai prophète ou grand magicien ?... Niveau musique, ce qui est bien quand on y connait rien, c’est d’être surpris par des découvertes sur le tard : “Starless” de King Crimson. Sinon Timber Timbre, l’album “Heligoland” de Massive Attack et j’avoue … Metronomy.

Laurent : Petit coup de cœur pour Moses Sumney, artiste très talentueux avec une maîtrise vocale à couper le souffle.  J’ai eu l’occasion d’assister à l’un de ses concerts l’année dernière. Il propose un mélange de style sur fond d’électro, musique soul, trip hop, rock…Je trouve son approche musicale très ingénieuse. A écouter… Une belle découverte aussi avec Kristin Hayter (Lingua Ignota), en version acoustique ! L’écoute de ses albums demande parfois du courage … mais c’est une réelle expérience en live ! Totalement inclassable, totalement dark …
Côté ciné, je ne me lasserai jamais des chefs d’œuvre tournés par J.Jarmush, W.Wenders, Joel et Ethan Coen, D.Lynch… Je pense que notre musique serait une très bonne BO de film … Monsieur Lynch, si tu nous entends !?
Un petit clin d’œil pour « Midsommar », d’Ari Aster. Ce réalisateur propose une approche très singulière du film d’horreur-Epouvante…
Dans un autre registre, très trash et à la limite du soutenable, j’ai vu Golden Glove de Fatih Akin . L’histoire d’un tueur en série à hambourg dans les années 70…Ames sensibles s’abstenir ! J’aime les films qui provoquent des choses, quand tu sors de la salle de ciné en ayant perdu tes repères, avec ta chemise qui dégouline de sueur… Avec ce genre de film, impossible de manger du popcorn, ni pendant, ni après !


13. Que pensez-vous des musiciens qui mélangent jazz et grindcore? Je connais notamment les japonais de RUINS qui sont assez tordus...


Laurent : Pas trop d’avis, Pourquoi pas !

Clément : je sais pas ce que c’est le grindcore :)


14. Question bonus: Si Bärlin était un jeu de concentration, tu dirais que vous seriez plus proches du Rubix cube ou du Mah-jong? (Dans l'esprit, ou ce que pourrait représenter ce jeu...)

Laurent : le strip-poker, c’est un jeu de concentration?

Simon : le Rubix cube n’est finalement qu’un jeu mathématique. En plus des couleurs pas très jolies, une seule forme est possible. Difficile de sortir du cube. Beaucoup l’utilisent aussi pour faire des performances. Pas trop notre truc. Je ne suis pas joueur mais le Mah-jong me semble déjà plus lent et réfléchi. Niveau apparence il permet aussi d’obtenir des dessins de reliefs bien différentes. Dans ce sens ça nous correspondrait plus.


15. C'est la dernière question, je vous laisse conclure. Merci pour les réponses.

Laurent : C’est quand le déconfinement ???

https://www.facebook.com/baerlinmusik

https://baerlin.bandcamp.com

Crédits photos:
-Photos 1, 3, 4, 5, 6: Zys
-Photo 2: Florent Bibaut
-Photo 7: Marcelle Torn